Quels entrainements pour améliorer la souplesse
Christophe FRANCK - 2016-01-29
La souplesse est une qualité physique permettant de réaliser des mouvements avec la plus grande amplitude ou mobilité articulaire. Associée dans son développement aux termes d'étirements ou d'assouplissements, visant les structures musculaires, articulaires et péri articulaires, la souplesse tient un rôle prépondérant dans la vie du sportif.
La souplesse est une qualité physique
De nombreux écrits divergent sur les vertus attribuées aux étirements, génèrant de la confusion dans ce qu'il faut faire ou ne pas faire. En tout état de cause, la souplesse étant une qualité physique, elle doit être entretenue. A ce titre, ce dont on peut être sûr, c'est que :
- Un sujet qui ne s'étire pas va s'enraidir et augmenter les contraintes articulaires. Cela va non seulement influencer négativement la performance à long terme, mais favoriser aussi des compensations indésirables, et donc des douleurs et des blessures.
- Suivant le contexte et l'objectif recherché, une technique d'étirement appropriée et bien réalisée est utilisée et permet l'apport de bienfaits sans danger.
Les bases physiologiques de la souplesse
Les éléments concernés
L'augmentation de l'amplitude d'une articulation met en jeu différents éléments n'ayant pas tous les mêmes qualités d'étirements. Certains ont une faible capacité d'étirement :
- Les tendons qui doivent leur faible extensibilité à leur constitution (du collagène) ;
- La jonction muscle - tendon, qui est la zone importante transmettant les tensions et ou se situe l'organe tendineux de Golgi (organe proprioceptif informant le système nerveux central sur l'état de tension du muscle) ;
- Le tissu conjonctif (enveloppe des muscles) constitué de mailles de collagènes ;
- Les capsules et les ligaments.
D'autres éléments, comme les muscles possèdent par contre une bonne qualité élastique. Ce sont les myofilaments d'actine et de myosine constituant la composante contractile qui sont extensibles.
Un autre élément, le sarcoplasme, tient un rôle important dans la faculté d'étirement. Lors de frictions internes dans les muscles, la température tissulaire augmente et la visco-élasticité diminue, favorisant ainsi l'allongement musculaire.
La transmission des tensions
Cette transmission se ferait par deux voies : une série et une parallèle (Hill 1971).
CEP : composante élastique parallèle (enveloppe fibreuse, aponévrose)
CES : composante élastique série (tendons, ligne Z, ponts actine- myosine) ; elle est fractionnée en deux parties, une passive résidant dans les structures tendineuses, une active localisée au niveau des ponts actine-myosine
CC : composante contractile représentant le processus de génération de la force (ponts actine-myosine)
Justificatifs neuromusculaires
Pour qu'un mouvement ait lieu, il faut une contraction du muscle agoniste et un relâchement de l'antagoniste. Il y a innervation réciproque des deux muscles :
- Un influx excitateur est envoyé au muscle fléchisseur ;
- Un influx inhibiteur est envoyé au muscle extenseur antagoniste.
Ces envois d'influx sont réflexes, c'est-à-dire sans contrôle de la volonté, et permettent le bon fonctionnement du mouvement tout en protégeant les muscles.
Le réflexe myotatique : réflexe d'étirement, il permet au muscle de lui rendre sa longueur initiale suite à un étirement et permet aussi de le protéger contre un étirement abusif. Il prend sa source dans les fibres musculaires sensitives, les fuseaux neuromusculaires, autour desquels s'enroule un neurone sensitif transportant les informations vers le système nerveux central (SNC). Le réflexe myotatique, trouvant sa source dans la sensibilité du muscle à l'étirement réalise une contraction tonique de celui-ci et permet le maintien de la posture.
Le réflexe myotatique inverse : contrairement au réflexe myotatique qui prend naissance dans les fuseaux neuromusculaires, le réflexe myotatique inverse prend naissance au niveau des tendons, sur les organes tendineux de Golgi. Lorsqu'une tension trop importante est appliquée sur un tendon, le réflexe myotatique inverse entraîne l'inhibition de la contraction musculaire pour protéger le tendon.
Le réflexe d'inhibition réciproque : lorsqu'un muscle agoniste se contracte, son antagoniste se relâche pour ne pas gêner le mouvement (facteur de coordination intermusculaire). C'est à partir de la structure du réflexe myotatique que s'ajoute un neurone intermédiaire, inhibiteur de l'antagoniste.
La boucle gamma : Les extrémités contractiles du fuseau neuromusculaire sont pourvues de fibres nerveuses motrices (motoneurones gamma). La stimulation de ces fibres, par les centres moteurs du cortex cérébral, provoque une contraction des extrémités du fuseau neuromusculaire, ce qui étire la portion centrale du fuseau, et stimule la fibre afférente. L'utilisation de la boucle gamma permet de faire chuter volontairement le tonus musculaire, en vue d'optimiser un exercice d'étirement ou de relaxation, à l'aide d'expirations forcées.
Facteurs d'amélioration de l'extensibilité
Selon C. Geoffroy - pratique des étirements, Edition Geoffroy, 5e édition, 2008
Le facteur amplitude
Trois secteurs liés à l'amplitude existent dans la déformation due à l'allongement :
- Une phase élastique, reliée à la notion d'entretien et crée par des efforts de tractions peu important et ou l'allongement disparait après la sollicitation ;
- Une phase plastique, reliée à la notion d'amélioration d'extensibilité et crée par des efforts importants produisant un allongement plus marqué et persistent après la sollicitation ;
- Une phase de rupture d'abord partielle puis totale dans le cas de tractions trop importantes.
Le facteur durée
Ce facteur est essentiel dans les étirements car l'unité myotendineuse est élastique mais aussi viscoélastique. Cela veut dire que l'élasticité dépend de la tension appliquée (l'amplitude), de la vitesse d'étirements (la mise en jeu des réflexes) mais aussi du temps pendant laquelle la tension est appliquée. L'allongement sera plus grand s'il suit une phase d'échauffement et si la tension dure plus longtemps.
Le ressenti
Lors de la phase élastique, l'étirement ne doit engendrer ni douleurs ni tremblements, puisque cette phase a simplement pour but de redonner sa longueur initiale au muscle (relâchement des ponts actine-myosine).
Lors de la phase plastique, l'étirement peut engendrer un tiraillement un peu douloureux au départ accompagné de tremblements. Le but est de réussir à relâcher les muscles pour gagner en amplitude. Quelques douleurs ou raideurs peuvent apparaitre le lendemain et il faudra simplement laisser le corps récupérer sans étirer de nouveau.
Les méthodes d'étirements
On distingue trois méthodes d'étirements :
- La méthode passive ;
- Les méthodes actives ;
- Les méthodes combinées ou activo-passives.
La méthode passive : elle fait intervenir le réflexe myotatique inverse. Une posture de détente correcte est adoptée, puis l'étirement est réalisé progressivement et doucement jusqu'au seuil de tension légère. Elle est maintenue 15 à 30sec avant un retour lent à la position initiale. Le propre poids, une force émise par un autre segment ou une force extérieure peuvent aider à réaliser l'étirement. Ceux-ci doivent être réalisés par séries (2 à 4) entrecoupées de récupération.
Dans ce type d'étirements, il y a une mise en tension des muscles, des tendons et des capsules articulaires.
La chute du tonus musculaire est recherché.
La mise en œuvre de cette méthode est aisée.
Les méthodes actives : elles sont appelées actives car des phases de contractions volontaires sur le muscle à étirer ou sur l'antagoniste vont être réalisées.
Les étirements statiques actifs : cette méthode fait intervenir le réflexe d'inhibition réciproque. Le principe est de relâcher le muscle agoniste en contractant l'antagoniste. La difficulté de maintenir la contraction de l'antagoniste peut entraîner une contrainte de mise en œuvre.
Les étirements activo-dynamiques : le principe est de combiner l'allongement d'un muscle en deçà de sa longueur maximale avec une contraction isométrique, puis d'enchaîner avec un relâchement et enfin un travail dynamique sur ce même muscle.
=> 6-8 sec d'étirement incomplet -> 6-8 sec de contraction isométrique -> 2 sec de relâchement -> une dizaine de mouvements dynamiques
Les méthodes combinées ou activo-passives : le principe est de combiner des contractions et des étirements.
Contracté - relâché - étiré (CRE) : cette méthode fait intervenir le réflexe d'inhibition post isométrique. Un muscle s'étire mieux après une contraction modérée. Il y a une association de contraction maximale isométrique, de relâchement et d'étirement sur le même muscle ou groupe musculaire.
=> 6-8 sec de contraction isométrique -> 2 sec de relâchement -> 20 sec d'étirement passif
Lors de la contraction, l'articulation doit être placée en position extrême.
Contracté - relâché - antagoniste contracté (CRAC) : le principe est identique au CRE avec une contraction de l'antagoniste lors de la phase d'étirement final.
La difficulté de maintenir la contraction de l'antagoniste peut entraîner une contrainte de mise en œuvre.
Les étirements analytiques ou globaux (ou posturaux) : les étirements ne visant qu'une seule articulation sont dit analytiques. Ceux mettant en action plusieurs chaînes musculaires sont dit globaux ou posturaux s'ils reprennent des positions spécifiques.
Cette méthode est souvent utilisée dans les cours de stretching et peut être soit totalement passive soit activo-passive. En maintenant une posture, on pousse contre une résistance fictive puis on se relâche totalement en respirant profondément.
Dans le cadre de rééquilibrage de la structure musculo-squelettique, cette forme d'étirements est indispensable.
Les méthodes à utiliser en fonction des objectifs
Pour l'échauffement lors de sa phase terminale :
- La méthode activo-dynamique ;
- La méthode du contracté - relâché - étiré avec un temps d'étirement final de 6 à 8 sec.
Pour le gain d'amplitude soit lors d'une séance dédiée à l'amélioration de la souplesse, soit en fin de séance d'entrainement si la structure musculaire n'a pas été traumatisée :
- La méthode du contracté - relâché - étiré ;
- La méthode du contracté - relâché - étiré - antagoniste contracté ;
- La méthode passive ;
- Les méthodes actives.
Pour un relâchement des muscles et du tonus musculaire lors du retour au calme en fin de séance :
- La méthode passive.
Quelques conseils et mises en garde
Quelques soient les méthodes utilisées, des précautions doivent être prises pour ne pas aller à l'encontre du bienfait recherché. Sans exhaustivité, on peut citer :
- Les temps de ressorts à proscrire ;
- Une modération dans les forces extérieures appliquées ;
- Pas d'application de contraintes excessives sur les genoux ou les chevilles ;
- Faire attention à l'hyperlordose (creusement des reins) ;
- La prise en compte des pathologies individuelles (lombalgie par exemple).
Les étirements prolongés, où la position est tenue plus de 45sec à 1mn, ne doivent pas être utilisés dans certains cas :
- Avant l'effort : car ils ont un effet analgésiant (on ressent moins la douleur) ;
- Dans les échauffement de sports explosifs : car ils diminuent la force (chute du tonus) ;
- Après une grosse séance de musculation ou d'athlétisme : car ils induisent des tensions musculaires accentuant les micro-traumatismes des fibres ;
- Après une séance intense sur le plan énergétique : car ils compriment les capillaires et compromettent la vascularisation post-effort.